Rites de Pas Sage plutôt pour ce sale gosse surdoué de la chanson. Emile Bilodeau a vingt ans, et quand on a vingt ans on ose tout. On ose donner des clés, on ose expliquer la vie, l’amour, la politique. Emile Bilodeau fait cela du haut de sa jeunesse fougueuse, mais il le fait avec originalité et un certain doigté il faut le reconnaître. Quand on a devant soi en concert ce jeune chanteur qui s’exprime avec sa voix forte et sa guitare malmenée, on reste bouche bée, un peu comme lui sur la pochette de son disque. Il est fort le gars, chez nous, les chanteurs ont moins de conviction, moins de tonus pour présenter leurs revendications.
C’est pas vraiment qu’il milite en fait, c’est qu’il a un tempérament frénétique et délibérément positif. L’Emile, il ne veut pas le savoir si les situations sont compliquées ou contingentes. Il sait comment détourner le hasard ou l’ennui pour faire ressortir une vision du monde déchirante d’humour et de vérité, il faut finir par l’avouer, il-a-raison! En plus décrire avec poésie sur les aléas de la vie, il sait chanter et jouer de la guitare fort habilement, mais surtout il sait entrer en phase avec le public. Emile est un chanteur qui parle. Il explique, il introduit, il raconte avec son violent accent québécois et sa faconde de jeune libéré des carcans sociétaux.
Un peu comme les chansonniers d’une époque, il tourne en dérision les événements du monde en n’oubliant pas toutefois de se moquer un peu de lui-même au passage. C’est ce qui le rend si sympathique. De toute façon, il ne laisse pas le choix, il y a avec tellement de force de conviction que l’on entre dans son jeu tôt ou tard. Voilà ce qui explique que cet artiste, si jeune, avec ses clés à lui, a ouvert plein de portes importantes dans l’industrie de la chanson. Le festival International de la Chanson de Granby, le Gala de l’ADISQ, la Révélation Chanson de Radio Canada, les Francofolies de Montréal, entre autres, l’ont distingué et récompensé. Il nous est arrivé à Paris en 2017 dans des showcases professionnels. Ainsi, en plus de la scène Montréalaise où je l’ai vu l’an passé, j’ai eu l’occasion de le voir plusieurs fois avant ce week-end en vitrine au Festival l’Estival de Saint Germain en Laye et ce lundi aux Trois Baudets.
Cette salle est très prisée des québécois, car c’est là, sous la houlette Canetti que Félix Leclerc s’est fait connaître bien avant le Canada. Et si l’on écoute bien le jeune Bilodeau, l’on perçoit des accents de Félix Leclerc dans ses chansons. L’on doit toujours être reconnaissant de ses inspirations, et Emile l’est, qui rend un programme hommage à Richard Desjardins également.
Pour résumer, voilà est un provocateur qui ne se moque pas du public et cela n’est pas donné à tout le monde. Aucun cynisme chez lui, mais une fraîcheur et une impertinence de bon aloi. Il ne désarçonne pas les convictions, il insuffle des éléments de bonheur. Il faut savoir écouter ce qu’il dit et chanter avec lui ♫ « Ca va, je vais marcher, je vais marcher« , ce n’est pas de la méthode Coué, c’est la méthode Bilodeau. ce québécois apporte un sang nouveau dans les scènes chanson, et m’est avis que les français devraient bien en prendre de la graine. Et voici le tube !
Annie Claire 25.09.2018