Yves-Ferdinand BOUVIER « Sous le grand ciel rosé d’un envol de flamants » 315p – Ed. Campioni

J’ai déjà eu l’occasion de chroniquer trois disques d’Yves-Ferdinand Bouvier avec grand plaisir, car l’homme est très riche intérieurement. C’est un penseur très libre qui s’affranchit des contingences matérielles. Son esprit acéré s’exerce sur la condition humaine avec une option légèreté qui est bien agréable. Dans son dernier ouvrage « Sous un ciel rosé d’un envol de flamants », l’auteur nous narre 50 destinées de plume et de vent, ce qui constitue le sous-titre de l’ouvrage. Le postulat de départ, l’auteur nous le donne dans sa préface : « Chaque être humain contient et représente l’humanité toute entière dans son ébouriffante diversité : nous sommes tous et chacun, tour à tour fort et faible, noble et vil, manuel et intellectuel, poète et épicier, femme et homme, amoureux et indifférent, aimant et intolérant, aimable et détestable, et tout à la fois grand et petit ».

Et le jongleur de mots se met à nous raconter la destinée de tous ses personnages imaginaires (il y en a bien plus que cinquante en fait). L’épopée est prenante, délectable, tant le singulier poète s’exprime dans un langage recherché, rempli d’allusions littéraires, musicales, religieuses, culinaires… Dès les premières pages, l’on a l’impression de lire du Boris Vian. Tout parait tangible, mais rien n’est vrai, l’humour règne en maître, le génie de l’auteur est de nous faire sentir nous-mêmes intelligents de comprendre ses nombreux jeux de mots et associations d’idées loufoques, mais percutantes. En fait pour résumer je pourrais dire qu’il s’agit d’un livre pour l’enfant qui réside dans chaque lecteur cultivé et exigent. La poésie, la belle langue, une dose maîtrisée d’érotisme et de naïveté rendent la lecture pour ainsi dire euphorisante.

A mesure que l’on avance dans l’ouvrage, l’on constate qu’à la fin des chapitres, l’auteur nous a mis une petite maxime qui résume l’action et qui déclenche le sourire. « La vie est une foire d’empoigne où le plus prévoyant ne s’en sort pas toujours mieux que l’insouciant – mais que ça ne vous empêche pas de vivre si vous être vivant. » C’est beaucoup plus amusant qu’un traité de métaphysique et pas forcément moins profond, c’est encore là que Y-F Bouvier rejoint Boris Vian. Revenons au livre, personnellement j’ai éprouvé la nécessité de faire des poses pour ne rien perdre de la saveur cachée dans toutes les pages. Les phrases sont longues et bien construites, elles recèlent de petits bijoux de sous-entendus, de références à des contextes historiques, géographiques et des préoccupations bien actuelles, comme l’écologie. L’un des personnages s’appelle Rémi Fraisse, une autre Cindy Lopez. L’auteur a d’ailleurs une certaine prédilection pour les noms et prénoms des personnages, il les répète à l’envi. Comme ils sont bien choisis, drôles et fortement évocateurs, il n’y a pas de lassitude en cela.

Yves-Ferdinand est un humain très badin, un chercheur d’idées fort prolixe qui réussit à nous régaler en nous contant la destinée de personnages surnaturels qui se croisent et se surpassent en permanence, tous genres et générations confondues, sans que jamais, dans son immense fresque épique, personne ne meure ni ne souffre, tout au moins de façon durable. Je ne raconte volontairement pas les intrigues qui sous-tendent les nombreux chapitres de ce livre, laissez-vous surprendre à votre tour.

Annie Claire 07.08.2019

 

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