Le Prix Georges Moustaki, qui a pour but de faire connaître des artistes francophones indépendants (dont les disques sont auto-produits), a beaucoup de succès auprès des artistes et aussi du public. Tous les styles d’expression musicale sont acceptés. Créé en 2011 par Matthias Vincenot et Thierry Cadet, Le Prix Georges Moustaki est organisé avec l’association Poésie et Chanson Sorbonne, avec le soutien de l’Université Paris-Sorbonne (Paris IV) et de son service culturel, et La Scène du Balcon, dans le cadre d’ « Une Saison de lecture dans le 2e arrondissement de Paris », avec le soutien de la Mairie du 2e, de la Ville de Paris et de la Région Ile de France. Les lauréats des années passées, outre la visibilité dans les médias, ont trouvé des producteurs, tourneurs et le retentissement du Prix Moustaki est très porteur.
Un peu d’histoire récente, ils ont remporté :
- En 2011 MELISSMEL Le prix du jury et le prix du public
- En 2012 VENDEURS d’ENCLUME Le prix du jury et le prix du public
- En 2013 ASHKEHOUG le prix du jury 3 MINUTES s/MER le prix du public
- En 2014 ROBI le prix du jury GOVRACHE le prix du public
- En 2015 LIZ VAN DEUQ le prix du jury JULES & JO le prix du public
- En 2016 ESKELINA les prix du jury et du public
- En 2017 LEOPOLDINE HH les prix du jury et du public
Cette année, à l’issue d’une finale bien intéressante, GATICA remporte le prix du Jury et GERVAISE le prix du Public ainsi que le prix Catalyse. Chaque année différentes prestations sont attribuées par les membres du jury aux finalistes, voir plus loin.
Faisant partie du jury depuis plusieurs années, je me réjouis de découvrir, à l’occasion des sélections, et faire connaître des artistes très variés. Les organisateurs reçoivent environ 200 candidatures, et plusieurs réunions de jury sont nécessaires pour mettre en exergue 22 demi-finalistes. Voici ceux de cette année qui ne sont pas arrivés en sélection finale, mais qui ont intéressé les membres du jury : Achille, Le Bal des Trépassés, Paul Barbieri, Belacide, Aude Henneville, Kiefer, Kiz, Livia, Marjé, Mèche, Mize, Nilem, Sylvain Reverte, Annelise Roche et Volin. Nous, en tant que professionnels, allons également suivre tous ces artistes, bien évidemment.
La huitième édition du Prix Georges Moustaki, dont la finale s’est jouée au Centre Malesherbes de La Sorbonne le 1er Mars 2018, était d’un excellent niveau artistique et remarquable sur le plan de l’organisation. La Présidente du Jury, Joyce Jonathan et Gauvain Sers, le Parrain de l’édition étaient avec nous lors des réunions, ils ont assuré le bon déroulement des opérations et sont des témoignages forts des étapes du parcours d’un artiste en développement vers une carrière pérenne, chacun de son côté et dans son style bien évidemment. A noter la présence dans la salle une nouvelle fois de Pia Moustaki, la fille de Georges Moustaki, qui fait partie du jury et qui a annoncé une actualité dont je ne vais pas tarder à parler.
Si trois éditions, 2011, 2016 et 2017, ont révélé une candidature unique qui emportait tous les prix, respectivement Mélissmel, Eskelina et Léopoldine HH, l’édition 2018 a permis de récompenser davantage de candidats. Sont donc montés sur scène le jeudi 1er Mars, par ordre alphabétique, ALYSCE, For The HACKERS, GATICA, GERVAISE, DENIS K, MEHDI KRUGER et CAROLE MASSEPORT.
Diversité respectée
La diversité des styles était bien représentée, Alysce [Alice Ducoin] est une très jeune artiste qui s’est fait remarquer par son remarquable jeu de guitare classique auquel s’ajoute une écriture concentrée et intense. Gervaise [Gernanique] est plus rock, et d’un tempérament espiègle et extraverti, joue la carte de la séduction. Gatica [Alejandra Roni Gatica] a davantage de bouteille. J’ai eu l’occasion de la voir sur scène maintes et maintes fois, au sein de formations variées. J’en ai beaucoup parlé ces dernières années et j’ai chroniqué son album Eponyme dans FrancoFans. Cette artiste d’origine chilienne a la voix chaude bien vibrante. Elle maîtrise parfaitement son art et sait faire les meilleurs choix pour ses accompagnateurs. Carole Masseport n’est pas une débutante non plus. Elle se fait remarquer par son élégant jeu de guitare basse, sa voix grave bien timbrée et, elle aussi, ses associations avec des artistes de talent. Voilà pour les filles, maintenant voici que nous avons découvert (je parle pour moi) le groupe For the Hackers. Ils sont jeunes et beaux, romantiques et ont « séduit » deux membres du jury, j’en parle plus loin. Denis K, [Denis Kooner] évolue dans des sphères musicales un peu désespérées pour ce qui est des textes, tandis que Mehdi Kruger propose une forme d’expression forte et intense. Je le perçois comme docteur ès mots, passant par la poésie du slam pour partager sa philosophie. Beaucoup de genres et de caractères différents sur scène donc pour cette finale.
Oui, mais sur scène que se passe t-il lors d’une finale ?
Ce sont finalement les aléas de la prestation sur scène qui ont brouillé les cartes. C’est le jeu de ces concours où un jury [très nombreux pour le Prix Moustaki avec des représentants des médias et des structures, lieux, festivals et agences diverses] ainsi qu’un public fervent et amoureux de la chanson impressionnent parfois les artistes les moins aguerris aux vicissitudes du direct live.
C’est cette année le journaliste Philippe Lefait qui dialoguait avec les candidats après leur prestation, essayant de les inciter à décrire un peu leur contexte artistique pendant les incontournables changements de plateaux. C’est là que l’on a vu le caractère bien trempé de ces dames qui ont trouvé une réplique bien administrée à ses questions plus ou moins codées.
Du direct live bien trépidant
Revenons à la scène, Alysce a commencé. Il faut avouer que le réglage du son n’était pas à la hauteur de la qualité de son jeu de guitare. Venant du classique, Alysce joue assise, or elle n’est déjà pas grande. Normalement, la puissance de sa musique, l’originalité de son écriture et de sa tessiture auraient dû largement compenser cette solitude scénique. La technique en a voulu autrement. Ca s’est amélioré pour les candidats suivants et Carole Masseport qui a chanté en dernier a bénéficié de meilleures conditions, mais la dernière place n’est pas non plus toujours confortable.
Les plus fortes personnalités scéniques ont attiré l’attention du jury et du public, Gatica, irréprochable de bon goût et et de finesse, Gervaise explorant l’escalade pour exercer sa séduction sur un membre du jury dans la salle, et Mehdi Kruger faisant passer toute son intensité dans sa gestuelle. Notons pour ces deux artistes la place forte du guitariste complice, Olivier Legall pour Gervaise et Ostax pour Mehdi Kruger. Le musicien de Carole Masseport, Geoffrey Boo est remarquable également.
Et qu’ont dit les urnes ?
Résultat des courses, le professionnalisme de Gatica a fait pencher le jury en sa faveur, l’audace et la fraîcheur de Gervaise ont plu au public, ainsi qu’à Bettina Vernet qui représente le Prix Catalyse doté de 1000€. Si j’osais, je dirais que la jeunesse des garçons de For The Hackers a séduit Stéphanie Berrébi de FrancoFans et Juliette Solal pour des raisons peut-être un peu différentes. FrancoFans va consacrer au groupe une interview dans le magazine et Juliette Solal une séance de coach scénique. Mehdi Kruger s’est posé en maître des mots, et Florence Cortès éditrice lui a donné son Prix du Scrib (50 pages publiées de ses textes). Deux candidates qui n’ont pourtant pas démérité à mes yeux n’ont pas remporté de prix, Alysce et Carole Masseport.
Une fois encore, il faut saluer les qualités d’organisation et le savoir-faire d’Amélie Dumas qui a coordonné les actions des très nombreux bénévoles. Si j’en juge par le nombre de photographes et de vidéastes qui étaient dans la salle, le Prix Moustaki attire bien des professionnels ainsi qu’ un public toujours heureux de participer au vote. Nous avons eu cette année le plaisir de revoir sur scène le sourire de la lauréate 2017, Léopoldine HH, qui connait bien les finalistes de cette année.
Annie Claire 03.03.2018